31/12/2011
Comorbidité et polythérapies
J’ai dans ma clientèle (certains pensent que dire patientèle fait mieux, de toutes façon, quelque part, les patients sont des clients, certes particuliers, car là, on touche à la santé, quoi que chez un garagiste, si celui-ci commet une erreur, ce n’est pas à la santé, mais à la vie à laquelle on touche).
J’ai, donc, dans ma clientèle, un patient d’une cinquantaine d’années qui les accumule (les maladies). Vers 23 ans (tout juste après de passer le CAPES de Mathématique, mais avant d’être titularisé) il développa un Trouble Bipolaire, après moultes péripéties, il fut enfin équilibré, entre autre avec du LITHIUM, et put, enfin, travailler normalement (naturellement pas à un poste auquel il eut pu prétendre vu ses diplômes.
Puis il fut couvert d’un Psoriasis Généralisé révélé par la prise de LITHIUM.
Puis apparut une thyroïdite : c’était le LITHIUM qui flinguait sa thyroïde ; Le traitement fut simple : rajouter du LEVOTHYROX (hormone thyroïdienne). Et un médicament de plus.
Puis il développa une Hypertension artérielle, car, depuis da prise de LITHIUM, il avait soif (effectivement le LITHIUM donne une sensation de soif), et comme il buvait du lait, il prit beaucoup de poids, d’où l’Hypertension Artérielle. Et un puis deux, puis trois médicaments, en plus, pour la tension.
Malheureusement son Psoriasis devenant préoccupant : il fit trois Erésipèles de jambe (c’est une infection cutanée à streptocoque ou à staphylocoque qui peut se développer quand la peau est lésée, c’est le cas du Psoriasis).
On arrêta donc le LITHIUM, le patient développa, dans la foulée, un Etat Dépressif Majeur très important : un Etat Mélancolique cogné.
Après… un an d’hospitalisation en clinique privée puis en Hôpital Psychiatrique, il ressortit, enfin, équilibré avec une trithérapie (trois médicaments) pour son trouble Bipolaire et il repris son travail.
Résumons :
- 3 médicaments pour le Trouble Bipolaire
- 1 médicament pour l’Insuffisance Thyroïdienne
- 3 médicaments pour la tension.
Cela ne fait guère, à 50 ans, que 7 médicaments.
En général, à 80 ans, on a trois pathologies, et comme il faut, en règle générale, trois médicaments par pathologie, on se retrouve facilement avec… neuf médicaments, parfois… plus.
Il est dit, classiquement, qu’après trois médicaments , les interactions médicamenteuses sont « très difficiles » à gérer.
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29/12/2011
Confraternité
Depuis la disparition du service militaire obligatoire, et vu la diminution, sensible, du nombre d’effectifs, l’armée n’étant plus qu’une armée de métier, le Service de Santé des Armées a dû reconvertir les Hôpitaux Militaires qui ont dus ouvrir leur soins au public, qui, avant n’étaient, exclusivement, réservés qu’aux seuls militaires.
Il se trouve qu’un de mes patients Diabétique (Diabète Type II pour les initiés, encore appelé, autrefois DNID, car il ne nécessite pas, tout au moins au début des piqûres d’Insuline. Tout cela par opposition au Diabète Type I qui lui, dès le début, nécessite l’Insuline, cela touche essentiellement les gens jeunes, alors que le Diabète Type II touche les gens de la maturité – à partir de 50 ans).
Il se trouve qu’un de mes patients atteint d’un Diabète Type II était suivi, de par mon initiative, par mon correspondant Diabétologue, un Professeur de Diabétologie du CHU.
Or, le patient ne le trouvait de moins en moins à l’écoute et les consultations de plus en plus rapides : cinq minutes montre en main me dit le patient impatient.
De son propre chef il me fit l’adresser dans un service de Médecine à l’Hôpital Militaire de la Grande Ville.
Et là, plus de nouvelles, plus de lettres, prescriptions faites sans confraternité.
Le plus fort fut quand, la Tension du patient ayant tendance à monter un peu, il changea, brutalement, le traitement antihypertenseur, je l’appris par le patient et l’ordonnance qu’il me tendit.
Disons que, intérieurement, je devins écarlate ; dans le privé les choses ne se passent pas ainsi, si un Médecin à un comportement de ce type, il est vite exclu du réseau des autres Médecins « fournisseurs » (les généralistes), on appelle cela la confraternité, disons que c’est tout simplement le respect de l’autre, c’est avoir une bonne éducation. D’autant plus que cela peut avoir des effets néfastes au niveau Médico-Légal ; le juriste ne travaille qu’avec l’écris (les paroles s’en vont lent, écrits restent), pas de courrier, pas de preuve en cas de « pépin » médical.
Je me « vengeais » de la façon suivante :
- Je fis faire au patient un bilan biologique complet avec Glycémie à Jeun et HbA1c, avec Microalbuminurie des 24 et demandais au Laboratoire d’Analyse Médicale d’envoyer un double au Médecin Général, Chef de Service, récalcitrant.
- J’adressais le patient à ma Cardiologue, il s’avère que sa TA s’est normalisée au bout de trois jours avec le nouveau traitement, or quand on instaure un traitement anti hypertenseur, il faut compter un mois avant d’avoir une efficacité. Et je demandais, à ma Cardiologue… d’envoyer un double de la lettre au Médecin Général, Chef de Service.
Ce n’est pas de la confraternité ça !
Et tout cela sur le dos du patient !
Il y a des moments, parfois, le métier d'exercer la médecine ne me satisfait pas, mais pas du tout !
00:19 Publié dans Anecdote, Coup de gueule, Médecine, Santé, Société, Vie pratique | Lien permanent | Commentaires (3)